Vingt-troisième leçon: So You Think You Can Diriger un Orchestre?!

2 avril, 20fictif

Chère postulante aspirante chef d’orchestre,

Suite à la lecture de votre formulaire d’inscription ainsi qu’au visionnage de votre démo, nous sommes sous le choc. Votre talent particulier, votre façon de diriger qui frôle la grossière indécence et votre manque total de jugement nous font croire que vous feriez une candidate exceptionnelle pour notre émission de téléréalité. Toutes nos félicitations, vous avez été choisies parmi tous les six candidats qui ont postulés pour faire partie de cette aventure qu’on croirait sortie de nulle part!

Veuillez nous retournez la décharge qui suit signée en bonne et due forme et dès la semaine prochaine, nous braquerons nos caméras sur votre périple musical.

Cordialement,

Le comité de sélection

PS: Nous avons transféré votre dossier à l’émission Loft Story, car nous croyons que votre potentiel télé-réalitaire dépasse largement votre talent musical.

Formulaire de non-responsabilité de la production

-La production de So You Think You Can Diriger Un Orchestre? se retire de toute responsabilité en ce qui a trait aux accidents physiques, aux séquelles psychologiques ainsi qu’à tout autre forme de blessures, de maladies, de morts ou autre dénouement encore plus tragique. Un seul gagnant sera déclaré à la fin de la compétition. Cette personne remportera un set de baguettes flambette, un coat à queue noir, un podium portatif ainsi que la chance de diriger l’Orchestre Symphonique de Montréal. Ce prix ne peut être monnayé. Nul si découvert. Détails à l’intérieur. Aucun achat requis. Des conditions s’appliquent.

(Ce formulaire a été rédigé par la firme Beauvais-Boisvert-Nguyen-Sanchez qui vous offre un deux pour un sur les mises en demeure cette semaine! Faites vite avant que le Barreau nous radie!)

 

Première émission

Nous étions six aspirants entassés dans les coulisses, dans l’attente que notre nom soit prononcé pour prendre place sur scène. La foule était des plus… grisonnante, somnolente et Alzheimer. Vingt-trois papis et mamies aux petites lunettes Jean Coutu sur le bout du nez attendaient impatiemment… la pause commerciale pour aller uriner. Sur scène, un animateur no-name présentait la compétition :

(…) et les participants de cette première… et probablement dernière édition de So You Think You Can Diriger un Orchestre? sont :

Kim Wong,

Thi Truc Qui Poo,

Igor Gardonletchek,

Yin Phass Lêd,

Steve Bibeau-Leblanc,

Et VOUS, mademoiselle!

J’entrai sur scène avec assurance en serrant la main de l’hôte :

-Bonjour monsieur, enchantée de faire votre connaissance… qui que vous soyez… je pensais que c’était le beau Ben Mulroney qui animait le show ?

-C’était effectivement sensé être lui, mais Justin Trudeau était jaloux de ne pas avoir sa propre émission de télé en tant que progéniture d’ancien Premier Ministre et, comme nous ne voulions rien savoir de lui… on a laissé la place à un nobody. C’est-à-dire moi (maudit télésouffleur!)

-Intéressant… pensez-vous que Ben va venir faire un tour quand même pendant l’enregistrement ?

-Ça m’étonnerait…

-Aahh…

-Par contre, je peux demander à Justin s’il…

-Oh oui ! Demandez-lui s’il peut appeler Ben pour le convaincre de venir! Quelle bonne idée!

-…

La première émission se termina. L’équipe de production nous conduisit dans un petit local douteux pour y passer des tests de classement.

Test no1 : Histoire de la musique classique

1. Quelle est la différence entre les opéras de Wagner et ceux de Mozart?

-Ils n’ont pas été écris par la même personne.

2. Nommez les trois compositeurs qui ont marqué l’époque classique:

-Mozart, Beethoven, Richard Clayderman.

3. Qu’est-ce que La Traviata, Nabucco et Don Carlos ?

-Des restos « apportez votre vin  » du Plateau.

Test no2 : Théorie musicale

1. Qu’est-ce qu’un ton voisin ?

-Ben… le gars qui habite à côté de chez moi… (quel rapport avec la musique?!)

2. Qu’est-ce le La 440 ?

-Vous parlez de celle qui traverse l’île de Montréal?

3. Qu’est-ce qu’un tétracorde ?

-Vous voulez sûrement dire un tétrapack : Beau, bon pas cher, en vente dans une SAQ près de chez vous!

Audition d’instrument

Alors que j’attendais mon tour dans le corridor, un petit homme asiatique à la coupe champignon sortit du local d’audition et me saisis brusquement par le bras gauche:

-Vous, venil avec moi.

Il me conduisit au piano en me serrant le bras si fort que je ne sentais plus ma main.

-Vous, jouer piano.

-Euh, ok.

Je commençai par mon Rachmaninov, la première des Neuf études tableaux opus 39 no1. L’un des juges m’interrompit en pleine interprétation:

-Pouvez-vous me lefaire ce passage sans la main d’oite, s’il-vous-plaît ?

-Vous désirez que je joue uniquement la partie de la main gauche?

-Non. Je veux que vous jouiez les deux palties à l’aide de votle main gauche uniquement.

-Euh… d’accord.

-Oh, j’oubliais: Sans le banc.

-Quoi?

-Sans votle banc. Allez, debout!

J’étais désemparée. Ces juges étaient de véritables fous. Pendant que j’essayais de jouer tant bien que mal mon Rachmaninov de ma main gauche, accroupie au piano, les juges se mirent à me crier des intentions de jeux et autres ordres:

-Andante!

-Presto!

-Rubato!

-Criez-moi des insultes!

-Hein?

-Allez, mademoiselle! Criez-moi des insultes! Injuriez-moi!

-Euh… conard?

-Oui! Continuez!

-Euh… épais? Pas de couilles?

-C’est bon! J’adore ça!

Je me sentais très mal à l’aise dans cette situation… c’était probablement dû à mon inexpérience à passer des auditions. J’ignorais que les grands pianistes de ce monde, tels qu’Alain Lefèvre et Vladimir Horowitz avaient dû passer par là.

-Maintenant, imitez le cri du canard en chantant la mélodie du soprano.

-Euh… couac, couac, couaaaaac ! couac, couac, couaaaaaaaac !

Quand ils m’ordonnèrent enfin de me taire et de quitter la salle, je fus prise d’un sentiment de soulagement si grand que je trébuchai sur scène et tomba tête première sur la table des juges. Le petit asiatique de tout à l’heure me regarda, me fit un sourire forcé et me dit :

-Tank you, come again.

Une fois sortie de cette pièce de torture, je croisai l’un des participants qui était passé tout juste avant moi dans la salle d’audition:

-Hé! Igor! Je viens enfin de sortir de mon audition… c’était horrible. Faire le canard en fredonnant Rachmaninov, jouer uniquement de la main gauche, sans mon banc et crier toutes ces injures aux juges… comment as-tu réussit à t’en sortir?

Igor me regarda, l’air découragé:

-Vous, idiote.

-Pardon?

-Vous, dans émission seulement pour cotes d’écoute. Vous, pas vite, vite.

Quel arrogant! Je compris à ce moment que j’étais seule dans ce combat et que je n’aurais aucun allié.

(À suivre)

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Vingt-deuxième leçon: À la conquête de la télé!

Je n’en revenais pas : j’avais réussit pour la première fois de ma vie à lire un article complet de Claude G sans m’endormir! Étrangement, j’avais juste envie de fesser dans un punching bag avec sa face dessus… probablement un effet secondaire des Gravols que j’avais absorbé lors du vol de retour. Je ne vois vraiment pas ce que ça pourrait être d’autre… vraiment pas.

Un mois plus tard…

Le téléphone ne dérougissait pas depuis plusieurs semaines, pour la seule et unique raison qu’il était rouge et que je ne l’avais jamais peint d’une autre couleur. Sinon, c’était le calme plat côté carrière. Maestra Helena était partie en tournée avec les Chemical Brothers et Arianne Moffat, aucun orchestre ne m’avait demandé mes services, pas même la fanfare de l’École Secondaire Des Décrocheurs de Sainte-Annes-Des-Creux-En-Estie. En Estrie, pardon. J’étais désespérée, je passais mes journées à regarder les infopubs et commander des Vap-O-Master 5000, des Chicken-Breastfeeders, des moules à muffins en coton recyclé ou des bracelets qui coupent la faim si on se les attache ben serré autour du cou. Quand une jeune étudiante en musique me téléphona dans le cadre d’un travail de recherche  pour me poser des questions sur mon emploi du temps en tant que chef d’orchestre, je lui racontai tout en détails, de mes débuts au piano jusqu’à mes après-midi auprès de Louise-Josée Mondoux. Choquée, elle me dit que j’étais pathétique comparée à Kent Nagano et je lui répondis : « Ah oui? Que pensez-vous que Maestro Nagano fait quand il est au chômage, hein? Hein? » (Silence) « Ben, je le sais pas moi non plus parce que j l’ai jamais vu au chômage!!! » Je vous épargne le restant de la conversation, loin de se terminer dans la joie et le respect.

Alors que j’en étais à caler ma troisième bouteille de Scotch mauvais marché (euh, ouin… mauvais marché qui veut dire « scotch qui coûte cher », en opposition au scotch bon marché, qui lui ne coûte presque rien), je syntonisai par erreur mon téléviseur sur la chaîne SeeBeeSee qui diffusait un appel de candidature pour le futur talent show « So You Think You Can Diriger Un Orchestre? »

Quand on dit que le destin fait bien les choses… trop bien même… ça fait peur…

 

Les étapes de mon inscription

1- Remplissez le formulaire suivant :

Nom, prénom : Tels qu’indiqués sur l’enveloppe

Date de naissance : Quelque part entre 1982 et 1983

Nom de la mère : Micheline ou Bernadette… je sais que c’est une des deux, mais laquelle… bonne question.

Nom du père : Wow, là, faudrait pas pousser… j’attends les tests de paternité des ex de mes présumées mères et vous reviens sous peu.

Depuis quand dirigez vous des orchestres?: Deux mois.

Motif de l’inscription à notre émission : Je suis motivée.

Qu’est-ce qu’une gamme mineure?: Une gamme de moindre importance.

Qu’est-ce qu’une clé de Do?: Une prise de lutte qui fait ben mal.

Qu’est-ce qu’une clé de Sol?: Pourquoi me posez-vous toutes ces questions sur la lutte? Je ne m’y connais pas beaucoup!

Quelle œuvre symphonique rêvez-vous de diriger? : Bittersweet Symphony du groupe anglais The Verve.

 

2- Lettre de référence :

Pour cette partie, je demandai à Maestra Helena de rédiger une lettre faisant état de mes talents de directrice, mais elle refusa de faire « une telle abomination ». Alex, quant à lui, était toujours introuvable… heureusement, madame Hoang accepta avec enthousiasme :

Monléal, avlil 200XX

À qui de doit,  

En tant qu’ancien plofesseul de piano de mademoiselle ici plésente, je vous oldonne de l’admettle dans votle émission poul avoil du plaisil galantit toute la saison. Elle, pas bonne dans lien, pas savoil ce qu’est un violoncelle, elle pas faile la diffélence entle une thelmopompe et un BigMac, elle pas capable de diffélencier un bâillement et une chanson de coeul de pilate (moi non plus, mais bon…). Vous ligoler comme des singes pendant toute l’émission si elle admise.

Madame Lisette Gigi Hoang,

Pianiste

 

3- L’audtion :

Pour cette étape finale, je dus me filmer en train de diriger un orchestre. Comme je n’avais ni salle de répétition, ni musiciens, je m’installai dans mon salon et y assis mes toutous en guise d’interprètes. J’insérai le CD d’André Rieu et c’était partie pour une valse endiablée! Je pris soin de m’habiller à la mode Roi Soleil et je dirigeai les toutous en pseudo-jouant du violon et en leur indiquant le mouvement à suivre avec le dandinement de mes fesses. Nul doute, cet enregistrement ne laissera pas les juges indifférents.

Ne restait plus qu’à attendre que les juges délibèrent.

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Décrochage! – Hommage à Claude

Je décroche de mon histoire un instant pour vous faire part de quelque chose qui m’a bien fait rigoler. Alors que je lisais une critique de Claude G., journaliste à La Presse, faite à l’égard d’un certain pianiste, une phrase me fit sursauter : « Il a déjà montré ses limites dans ce dernier cas et je ne vois pas comment, à 28 ans déjà, il pourrait vraiment évoluer. » À 28 ans déjà… Je sais qu’à 28 ans, on est vieux et on ne peut plus évoluer. C’est fini. Mais combien d’avocats ai-je vu entrer à l’université à 41 ans pour débuter une nouvelle carrière, de médecins se découvrir une passion pour le domaine de la santé à 32 ans suite à la mort d’un de leur proche? 28 ans… Mais bon, dans ce cas précis, on parle de piano, de musique classique, ça n’est pas n’importe quoi pfffff! On ne parle pas d’opérer des gens ou de défendre des victimes de viol, ON PARLE DE MUSIQUE CLASSIQUE!

Sur ce, voici la 21ème leçon intitulée : Hommage à Claude

Dans l’épisode précédent (Previously on La leçon de piano):

-Tu viens pour me dire bonjour ou t’as trouvé le moyen de me sortir d’ici?

-Tu vas être obligée de diriger l’OSM à distance.

-Hein? Qu’est-ce que tu veux dire?

-On va placer une caméra dans ta cellule et les musiciens vont regarder tes gestes sur un grand écran.

-wow, c’est pèté.

-Mets-en.

La suite…

Cyberpresse, Janvier 20 ??

Étrange direction.

La nouvelle élève de la célèbre maestra Helena Yougotobëkiidiing faisait ses débuts à Paris hier soir. Au programme, une symphonie de Mozart.

Maestra Helena ouvrit la soirée avec une symphonie déconcertante du décompositeur anti-contemporain Melève Tarr-Lewikänd. Cette œuvre des plus dénuée de piano fut interprétée par l’orchestre au grand complet. Ma foi rien de surprenant puisqu’il s’agit d’une œuvre symphonique.

L’ouverture fut suivie d’une performance acrobatique de la part du violoniste rustre Ibeür Épaissatöss. Ce saltimbanque nous livra une prestation tant musicale que visuelle alors qu’il interpréta Rachmaninov perché sur un fil de fer au-dessus de la salle. Violon faux, rythme inégal. Rien de bien flamboyant ici.

C’est en direct de sa cellule viennoise que l’élève de maestra Helena conduisit l’orchestre symphonique de Montréal dans un Mozart surprenant. Malgré l’étrangeté de la situation, gênée par des difficultés techniques d’Internet lent, la jeune conductrice arriva, après 10 minutes, à signaler à l’orchestre de débuter la symphonie à la 24ième mesure afin « qu’on en finisse au plus vite » comme elle le cria si bien. À 29 ans, malheureusement, cette débutante dans la direction d’orchestre s’y est prise beaucoup trop tard pour débuter sa carrière. À cet âge, j’avais déjà visité la lune 3 fois et je jouais du violoncelle ben high avec mes fesses. Hors, cette élève est en plein apprentissage de son art. J’ai le pressentiment qu’on la verra bientôt œuvrer derrière un comptoir de Tim Hortons, car nul ne peut consentir à intégrer le monde de la musique classique à un âge aussi avancé.

Malgré un concert qui se termina 5 minutes plus tard que le 22h00 habituel, m’empêchant de gagner le lit à 23h00 précises comme je le fais depuis 52 ans, cette soirée fut o.k.

__________________

Chef invité : Maestra Helena

Chef apprenti : Élève de Maestra Helena

Mardi soir, Paris.

Programme :

Ouverture Déconcertante, Melève Tarr-Lewikänd

Petite pièce pour violoniste saltimbanque, Ibeür Épaissatöss

Symphonie de Mozart, OSM

 

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Vingtième leçon : Paris, nous voici!

Pour ma première leçon, j’arrivai chez Maestra Helena accompagnée :

 -Pouvez-vous me dire ce que Nico Archambault fait avec vous?!

 -Ben… il m’a aidé à monter ma chorégraphie.

 -Hein?!

 -Ben oui, ma chorégraphie sur une symphonie de Mozart…

 -Pensez-vous vraiment que le chef d’orchestre danse devant les musiciens??

 -Absolument, sinon, je vois pas ce qu’il pourrait bien être en train de faire…

 -Dites à Nico Archambault de décâliss*** d’icitte au plus vite.

 -Nico?

 -Ouais?

 -Décâl****.

 -Ok. Bye.

 Helena me fixa dans les yeux, l’air découragée :

 -On part d’encore plus loin que je le croyais. J’avais prévu consacrer ce premier cours à l’histoire de la musique, mais je pense que nous sautons des étapes cruciales en abordant cet aspect. Commençons plutôt par : Mais qu’est-ce que la musique?

 -Mmm, je dirais que c’est du bruit qui sonne bien.

 -Oui, en quelque sorte.

 -Des sons qui, ensembles, donnent de quoi.

 -Mm, mmm….

 -Des hauteurs dans l’espace qui s’associent à un moment donné et finissent par créer des sons plus complets que les sons de base dans la nature.

 -On s’éloigne. Disons seulement que la musique, c’est des sons organisés.

 -Ok, ça me va.

 -Savez-vous ce qu’est une symphonie?

 -Mmm… des sons bien organisés en ost**?

 Sur ces mots, elle me tendit un exemplaire de « La direction d’orchestre pour les nuls », un ouvrage fait sur mesure pour moi puisque je veux apprendre la direction d’orchestre et que je suis nulle.

Comme ce premier cours avec Helena se passa plutôt mal, arrivée chez moi, je me mis à la recherche d’un concours dans les magazines et les journaux afin de me changer les idées :

 -Gagnez un séjour pour deux en Alaska! (bof… je sais pas)

-Une semaine romantique à Paris à remporter! (ça pourrait être pas pire…)

-Gagnez une fin de semaine détente dans un Spa norvégien! (non, pas mon genre…)

-Voyez l’OSM à Berlin gratuitement! (Oh, ça commence à avoir de l’allure…)

-Dirigez l’OSM à Paris.

Avais-je bien lu? C’était le concours parfait pour moi! Il s’agissait seulement de remplir le bon de participation, de répondre à la question d’habileté : 1+1= et le tour était joué! Chanceuse comme je le suis, on me téléphona deux semaines plus tard pour m’annoncer que j’étais la grande gagnante du concours!!!

Maestra Helena en perdit son dentier et sa gaine lorsque je lui annonçai la nouvelle.

Ma maîtresse choisit une célèbre symphonie de Mozart pour mon fameux récital parisien : Symphonie no 40 en Sol mineur (http://www.youtube.com/watch?v=-hJf4ZffkoI&feature=related). « Pfff, me dis-je, ça va être facile!!! » Je pense que Mozart entendit mon exclamation et la pris pour un affront puisque les mois qui suivirent furent un véritable enfer. Malgré la simplicité de la symphonie, je n’arrivais pas à saisir l’essence de la pièce. Quand je croyais enfin avoir tout pigé, Maestra renvoya les trois saxophonistes et le guitariste métal que j’avais intégré à l’orchestre en hurlant que même sa perruche n’aurait jamais fait un choix artistique aussi épais (et croyez-moi, sa perruche sait ce dont elle parle en plus de porter le veston, le haut-de-forme et le monocle à merveille).

—–

Paris, janvier 20??

Ah, la France! J’étais charmée d’atterrir à Paris pour la première fois de ma vie. Je me préparais sans répit depuis 6 mois pour ce concert tant attendu. Je savais que j’étais prête pour le grand jour, mais je n’arrivais pas à chasser l’angoisse qui me bousillait les entrailles. J’étais horrifiée. Puis nous eûmes une répétition qui fut catastrophique.

-Mais qu’est-ce qui se passe avec vous, chère élève? Le concert est dans deux jours et vous n’arrivez pas à vous souvenir de cette putain de symphonie de Mozart?!

-Désolée, Maestra, je… je suis morte de trouille!

-Eh bien, peut-être que cette carrière ne vous est pas destinée si vous êtes incapable de gérer votre stress!

J’aurais donc fait tout ça pour rien? Le conservatoire, les concours, la composition, les masterclass, l’enseignement, le voyage à Paris gratuit… une année et demi entière de ma vie, gaspillée? Il n’était pas question que j’abandonne si près du but : Je pris donc les grands moyens et m’achetai un billet pour Vienne.

——

« Écoute, Moz’, hurlai-je, si jamais la fin du monde arrive pis que je suis la seule chef d’orchestre survivante – et tu sais très bien, comme moi, qu’avec la chance que j’ai, ça se peut très bien que ça arrive – tu veux pas que je transmette tout croche ta musique aux futurs musiciens, non?! Ça fait que tu vas m’aider à diriger c’t’orchestre-là comme du monde, pis après, je t’achale pu, ok?!?! »

Au moment où j’allais remettre les ossements de feu l’enfant prodige dans leur trou, deux policiers me saisirent par les épaules violemment. Dans une langue incompréhensible, ils m’ordonnèrent de les suivre.

——

Dans la prison de Vienne…

Je fus surprise d’être placée dans une cellule avec un homme plutôt qu’une femme. Un horrible frisson parcourra mon corps lorsque je tombai face à face avec ce géant musclé à l’épiderme couverte de tatous. Heureusement, je compris que j’étais en sécurité en voyant que l’une des illustrations sur son bras droit était deux hommes qui s’embrassaient et que dans un cœur, c’était écrit : « J’t’aime Gaétan ». Je fus doublement soulagée quand j’entendis le gorille s’exclamer, en me voyant :

-Tabarn**.

-Oh! Vous êtes Québécois!

-Ben oué, toué si on dira’ ben!

Un splendide sourire illumina le visage dur du détenu. J’en profitai pour engager la conversation :

-Qu’est-ce que vous avez commis comme crime?

-J’ai tué mon voisin. Ça fasait dix ans qu’y nous écœurait, moé pis mon chum, ça fait que maintenant, y nous achalera pu!

-Ah, pauvre vous… je suis pas sûre que ça va régler votre problème par contre: Moi c’est un gars mort v’là 220 ans qui me pourrit la vie ces temps-ci!

(Silence remplit de confusion)

-…pis vous, pourquoi vous êtes en prison, ma p’tite m’amzelle?

-Bof, pour cent fois rien… seulement pour avoir déterré la dépouille de Mozart pour le supplier de m’aider à diriger l’OSM.

(Silence de malaise)

Le sourire de mon interlocuteur s’estompât. Il grimpa sur son lit et ne m’adressa plus la parole de la journée.

Alors que je commençais sérieusement à songer à m’évader de ma cellule, je vis Maestra Helena apparaître de l’autre côté des barreaux. Étrangement, elle n’avait pas son air sérieux et détaché habituel, elle portait une jolie robe fleurie et ses cheveux tombaient quasi-gracieusement sur ses épaules de footballeur en uniforme. Elle était presque jolie, n’eut été du fait qu’elle ne savait clairement pas se maquiller.

-Le rouge à lèvre, ça va sur les lèvres.

-Ah… je le saurai pour la prochaine fois, dit-elle en essuyant les deux ronds rouges foncés qu’elle s’était dessinée sur les joues.

-Tu viens pour me dire bonjour ou tu as trouvé le moyen de me sortir d’ici?

-Tu vas être obligée de diriger l’OSM à distance.

-Hein? Qu’est-ce que tu veux dire?

-On va placer une caméra dans ta cellule et les musiciens vont regarder tes gestes sur un grand écran.

-wow, c’est pèté.

-Mets-en.

À suivre….

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Dix-neuvième leçon: Une nouvelle direction

Ma vie avait totalement changé un an auparavant : Leçons privées, conservatoire, masterclass, concours internationaux, compositions… c’était bien beau tout ça, mais je me demandais où ça allait me mener. Alors que je racontais mon parcours à ma psychologue, celle-ci me fit remarquer qu’en huit mois, j’avais réalisé plus de choses que Gérald Tremblay en une vie. Je lui rappelai qu’à mon âge, Mozart était bientôt sur le point de mourir… elle me rassura en me disant que c’était peut-être également mon cas, sait-on jamais… quelle psy remarquable, elle a toujours les mots pour le dire!

C’est un soir, en écoutant Privé de Sens, le quiz de Normand Brathwaite, que j’eue une illumination : En effet, le show était tellement plate que je changeai de poste pour le show de Jean Airoldi (T’sais, celui où il habille tout le monde comme lui et fout des débardeurs à tous les gars?). Ce dernier portait un coat à queue… cette tenue fort inappropriée pour  cette émission de matantes me plongea dans mes souvenirs d’enfance……..

-École primaire de Cork, Irlande du Sud-Ouest, année floue….-

-Dites-moi, chers enfants catholiques… que rêvez-vous de devenir plus tard?

Un jeune garçon au visage rond se leva : « Pompier, madame! »

-Bien, un pompier est très utile à la communauté, surtout la nôtre…

-Moi, je voudrais être secrétaire, comme ma mère!, cria une petite fille.

-Très bien, Caitlin.

-Moi, je veux devenir monsieur Stokowski.

-Hein?

-Oui, oui!

-Euh… je ne comprends pas, mademoiselle…

-C’est un homme en long manteau à queue qui fait aller sa baguette devant l’orchestre de Mikey Mouse dans Fantasia!

-Ah, vous voulez devenir chef d’orchestre!

-Oui, madame!

-Mais vous ne pouvez pas, ma belle, vous êtes une femme et les femmes sont faites pour tomber enceintes par accident à 15 ans et procréer jusqu’à leur mort prématurée par les naissances multiples.

Mon rêve était anéanti. Quand je racontai cette anecdote à mes parents, ils furent choqués par la réponse de ma professeure. J’ignore si tout cela est relié, mais deux semaines plus tard, mon père me tendit un passeport canadien en me disant : « À partir d’aujourd’hui, tu n’es plus Mary, tu es Alice Langelier. Nous déménageons en Amérique. » Il termina avec : «Oh! Et je n’ai jamais fait partie d’une cellule terroriste. »

Je devais réaliser ce rêve d’enfance avant qu’il ne soit trop tard. Je me mis à la recherche de quelqu’un qui puisse m’initier à la direction d’ensembles musicaux et c’est dans un quotidien que je tombai sur la personne qu’il me fallait :

Maestra Helena.

Professeure, direction d’orchestre.

Je mixe également des tounes, les vendredis soirs, avec Mistress Barbara.

Maestra Helena m’accueilli dans son chic appartement du Vieux-Montréal. Cette femme à la carrure digne d’un goon des Flyers de Philadelphie m’invita à entrer de sa voix forte et grave.

-C’est drôle, lui dis-je en la voyant, vous me faite penser à quelqu’un…

-Oui, je sais, tout le monde me le dit : Je ressemble comme deux gouttes d’eau à Marc Hervieux.

-C’est ça, oui!

Cette femme remarquable me servit un scotch et me parla de son parcours on ne peut plus étrange. Elle me raconta qu’elle était à l’origine d’une nouvelle note de la gamme appelée « Hörg » (H pour les anglophones, HH pour les allemands). Alors qu’elle solfiait, au lieu de dire « Sol », elle s’étouffa et chanta « Hörg! ». Son professeur fut étonné d’entendre ce son nouveau qui n’existait pas dans la nature. Elle me confia que, d’ici un an, tous les pianos du monde entier seraient rappelés à l’atelier pour que le Hörg soit ajouté à chaque octave (Hörg se situe entre Sol et Sol#). Elle me raconta également qu’elle était la première femme à avoir dirigé un orchestre composé uniquement de musiciens manchots en 1986. Cet ensemble était parfait pour interpréter  ‘’4’ 33’’ de John Cage (http://youtu.be/hUJagb7hL0E?t=58s).

Impressionnée par le parcours de cette armoire à glace au cœur chaleureux, je lui demandai de m’apprendre son fascinant métier. Charmée par ma naïveté et mon manque total de discernement (c’est dans ces mots qu’elle me le dit), elle accepta de me prendre sous son aile…

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Dix-huitième leçon

J’étais la grande gagnante du Concours international de musique du Kazakhstan, je n’arrivais pas à en croire mes yeux. Alors que je pensais que le pire était derrière moi, un des juges m’annonça que je devais maintenant aller chercher mon prix… il me pointa un long corridor en flammes :

-Vous ne pensiez tout de même pas qu’en jouant un simple concerto de Rachmaninov, vous alliez remporter une statuette d’or?

-Ben… oui.

-Au Kazakhstan, les règles sont bien différentes de celles de votre pays, ce douillet Québec! Vous devez aller chercher votre prix au fin fond de ce corridor de feu, humectée de kérosène, les pieds nus et les mains attachées au dos!

-Wow, merci!

-Hein?

-Merci de considérer le Québec comme un pays, monsieur.

-Euh… ma foi, votre indifférence totale face à cette situation périlleuse me trouble… ce n’est pas évident de créer un climax dans une histoire où vous vous trouvez… quoiqu’il en soit, votre récompense vous attend dans l’antre du diable, mouhahahaha!!!

Au moment où je m’aspergeais de kérosène devant la foule en délire, j’aperçu un visage familier en coulisses :

-Alex???

-Euh… toi!

-Tu ne te rappelles pas de mon nom?

-Tu ne me l’as jamais dit!

-C’est vrai, t’as raison! Mais… qu’est-ce que… Oh! Mon sauveur! Je savais que tu ne m’abandonnerais pas aussi facilement! Mon prince charmant, mon Ben Stiller qui vient sauver la Jennifer Aniston que je suis!

-Euh… on parle de quoi, là?

-Ben, de toi, venu pour aller chercher mon prix, au bout de ce couloir de feu, arrosé de kérosène, les pieds nus et les mains attachées dans le dos!

-F**k.

-Allez, je t’attends!

-Euh… je… eeeuh… j’ai mieux à te proposer…

-Quoi?

———————————-

À mon retour à Montréal, je découvris sur le manteau de mon foyer quatre magnifiques statuettes, des Félix, avec une note d’Alex :

Pour mon unique élève préférée,

Directement de l’Adisq

Félicitations pour tes honneurs

Je dois me sauver de la ville pour quelque temps

Si la police demande,

Tu ne m’as jamais vu.

A.

J’étais maintenant détentrice de quatre Félix!!! Un pour Lylatov, un pour Fidèles insomnies, l’autre pour Carnet de notes et un dernier pour Hommage à Mathieu. Ils étaient tous signés Alain Lefèvre! Wow, en plus d’avoir ces statuettes, Alex avait fait graver le nom de mon deuxième pianiste préféré! Quelle attention!

Il était revenu pour moi, pour me sauver des flammes… malheureusement, il s’était évanoui dans la nature une fois de plus sans me laisser d’indices. Maintenant, toutefois, je savais qu’il était toujours en vie et qu’il avait été mit sur Terre pour me guider.

Ou quelque chose du genre.

Un héros moderne, quoi.

Un prince charmant de conte de fée Disney, vasectomisé, à l’origine de la fin alternative : « Ils vécurent heureux et bais*** comme des lapins dans l’insouciance. »

Un Don Juan eunuque.

En gros, un cœur tendre avec un gros deux de quotient et le romantisme d’un yorkshire castré.

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Dix-septième leçon – Les honneurs, enfin!

Mes quelques contrats de trames sonores pour films classés XXX étaient certes très payants, mais le statut quo n’a jamais été mon idéal et je manquais de défis. Le destin fait parfois bien les choses puisqu’un matin où je pensais sérieusement à tout laisser tomber, je reçu un nouveau mémo de la part de madame Hoang :

 Concoul’ Intelnational de musique du Kazakhstan

Auditions demain

Voici un billet poul’ le Kazakhstan

Adieu

Ginette Lee Hoang

PS : Vous moulil bientôt, épaisse!

C’était ma chance ultime de prouver ce dont j’étais capable. Oh! En tournant le mémo de bord, je vis que madame Hoang avait écrit autre chose :

En passant

Vous pas besoin de plouver quoique ce soit

Nous déjà avoil la pleuve que vous êtle poche

Elle avait raison, je devais simplement aller confirmer mon statut de pianiste : Inutile de prouver quoi que ce soit à qui que ce soit, car Madame Hoang et Alex, Dieu ait son âme (j’imagine?! Je ne l’ai plus jamais revu…) croyaient fermement en moi comme ils croyaient au Père Noël ou en un Québec souverain.

 Les qualifications

Les juges m’imposèrent une œuvre affreusement complexe, soit le concerto numéro 3 de Rachmaninov (http://youtu.be/XUkSqqwU1LU?t=2m10s). Ils me donnèrent 5 minutes pour passer à travers les cent quelques pages du concerto (en fait, tous les autres concurrents avaient eu les partitions trois mois à l’avance, mais comme je m’étais inscrite le matin même des qualifications, je dus me débrouiller avec 5 minutes de lecture rapide). Persuadée que je ne serais jamais capable de le jouer, j’étais si nerveuse que lorsque je m’assis au piano et que je réalisai qu’un de mes lacets était défait, je m’empressai de le nouer afin de faire bonne impression devant les juges. Malheureusement, dans mon élan pour me baisser vers mes pieds, je m’assommai violemment sur le clavier et je perdis connaissance. Ma tête commença à valser d’un côté puis de l’autre du clavier, de plus en plus rapidement, imitant le son d’arpèges, d’accords totalement délirants. Quelques minutes plus tard, elle s’arrêta net sur le clavier ensanglanté et tout mon corps s’écroula sur la scène. Le visage tuméfié, les ambulanciers me conduisirent d’urgence à l’hôpital Général du Kazakhstan.

Quelques jours plus tard, c’est escortée par une horde de musiciens célèbres que je fis ma sortie de l’hôpital. Confuse, je demandai à cette foule ce qui se passait :

 -Mademoiselle, votre prestation fut la plus remarquable que nous ayons entendue depuis le début de ce concours! Votre rapidité d’exécution, la façon dont vous aviez l’air de flotter au-dessus du clavier, votre esprit qui semblait totalement ailleurs et surtout, cette nonchalance qui vous donnait un air prétentieux… j’en suis bouche-bée!

Ainsi furent les paroles de Marc-André Hamelin, ce grand pianiste que j’admire depuis ma tendre enfance. Il poursuivit :

-Ce qui m’a le plus impressionné toutefois, c’est votre finale dans un bain de sang. Il m’est souvent arrivé de faire des crises cardiaques pendant que j’interprétais Godowsky et Alkan, heureusement que ma femme était là avec le défibrillateur pour me ressusciter, mais un bain de sang… là… je m’avoue vaincu!

La finale

Assise au grand piano Steinway devant les quelques milliers de spectateurs présents dans la salle, je me demandai comment j’allais faire pour rejouer le fameux concerto, d’autant plus que pour la grande finale, je n’avais pas droit aux partitions. J’interprétais la pièce avec un orchestre local…. Je n’avais jamais réussit à jouer en même temps qu’un orchestre, pas même d’un chanteur d’opéra ou d’un vulgaire métronome. Le beat, c’est pas fait pour moi. La mélodie non plus d’ailleurs : Tout se passe entre moi et le piano. Quant à moi, il pourrait ne pas y avoir de clavier que j’en serais davantage ravie : Adieu fausses notes, adieu heures de pratiques interminables!

Le chef vint pour commencer la pièce, mais je lui fis un signe de «Time Out » avec mes mains : Je n’étais pas prête. J’essuyai mes mains moites sur ma robe noire, je cherchai mon souffle…. Le maestro tapait du pied, une main sur les hanches, en me regardant d’un air terrifiant : « Doux Jésus, ma belle, faudrait peut-être te grouiller les foufounes! On n’a pas juste ça à faire, attendre après toi, chou! ».

Puis, les premières notes de l’orchestre se firent entendre.

Lorsque ce fut à mon tour de jouer, je me rappelai ce que le maître Guillaume Lelièvre, ce pro du air piano nous avait dit : Tout est dans le mouvement. Le mouvement. LE MOUVEMENT. Alors, je me meus (euh… on dit meuve? Mous? Je me mou? C’est ça?!) Je fis semblant de jouer du piano et je bougeai comme un grand pianiste en transe en chantant la mélodie avec ma bouche. « Ta-tatataaa-tatataaa-taaaaaaa-tatatata-ta-ta-tatataaaaaa…. »

Trente minutes plus tard, la voix éraillée, les muscles endoloris, la musique se tue pour laisser place aux applaudissements du public.

-Bravo! Bravoooooo! Bravisssssssimo!!!

La foule était en délire. Je n’y comprenais plus rien. En coulisses, nulle autre que Martha Argerich, cette légende du hammerklavier, m’aborda :

 -Vous savez, mademoiselle euh…. Qui que vous soyez…. C’est tout un exploit que vous venez de réussir. La plupart des candidats ne sortent pas vivant de cette épreuve, ou perdent totalement la raison…

-Ah bon? Je croyais pourtant que Richard Abel y avait participé…

-En effet.

 (long silence)

 -Vous avez fait ce qu’il fallait : Bouger en faisant des sons avec votre bouche. C’était l’unique façon de s’en sortir.

Au moment où elle m’expliquait cela, je vis du coin de l’œil un jeune participant dont la tête explosa en plein milieu du premier mouvement. La scène était couverte de morceau de cervelle surchauffée.

-Félicitations, ma belle, vous remportez ce concours International de musique du Kazakhstan!!!

Je n’en croyais pas mes oreilles : Martha Argerich venait de roter!

-Hey!!! Mademoiselle, je viens de vous dire que vous remportez le putain de concours!

Mon Dieu! J’AI GAGNÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉÉ!!!!

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Seizième leçon – Quand le téléphone sonne…

J’avais envoyé mon démo quelques mois auparavant à une compagnie de disque spécialisée dans la musique classique. Un homme me téléphona un soir pour m’annoncer que j’avais été choisie pour enregistrer un album hommage à Stockhausen (écouter un extrait : http://youtu.be/1v7YYvPSYzw). On m’expliqua que ma candidature avait été retenue, car même si je jouais tout croche, personne n’allait jamais s’en rendre compte, pas même la réincarnation de Stockhausen elle-même. L’enregistrement de cet album fut des plus pénibles, surtout pour le pauvre piano qui n’en pouvait plus de se faire piocher dessus à coup de marteaux (le technicien de son m’expliqua, alors que j’étais en transe au-dessus du clavier avec mon marteau en fonte, qu’il « Y A DÉJÀ DES OST*** DE MARTEAUX DANS LE PIANO, PAS BESOIN DE FESSER DESSUS AVEC UN AUTRE MARTEAU, OST** D’ÉP***** ») Irritée par son intransigeance, je lui expliquai calmement, les larmes aux yeux, que « quand on me dit que le piano est un instrument à cordes / Frappez! À l’aide d’un marteau,  je fais ce qu’on me dit de faire!!! » De toute façon, encore là, il me rassura en me disant que même si le piano était défoncé de partout, et que plusieurs cordes s’étaient rompues, pas même Stockhausen en personne ne s’en rendrait compte à l’écoute de sa pseudo-pièce.

Nous eûmes beaucoup de difficulté à obtenir une photo satisfaisante pour la pochette de mon album puisque je n’arrivais pas à avoir l’air bête lorsque le photographe prenait ses clichés. Il avait beau m’expliquer qu’une photo de musicien classique, c’est comme une photo de passeport  « Plus on a l’air en maudit, plus c’est crédible », je n’y arrivais tout simplement pas. Ma joie de vivre transparaissait et cela risquait d’irriter au plus haut point les nonagénaires snobinards qui allaient acheter l’album.

La sortie de cet hommage me donna beaucoup de visibilité. Ainsi, je fus contactée par une célèbre réalisatrice de films à succès qui me commanda une trame sonore particulière pour un long métrage destiné au web. En fait, elle me parla plutôt d’un « long mètage », mais je croyais qu’elle avait simplement oublié un « r »… hélas… La première pièce de l’album s’intitule « Le facteur sonne à la porte », la seconde : « Il demande si son mari est à la maison », la troisième : « Bing, bang sur le ti-tapis Welcome » et j’ai intitulé la dernière « La bonne et le jardinier se mêlent à la partouze ». C’est le cas de le dire, je sens que cet opus est sur le point de « faire lever » ma carrière.

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Erratum

***Pour les pianistes qui auraient été offensés par la réponse donnée par notre chère amie à la dernière question du test psychologique, eh bien, voici quelques jokes d’auteur pour vous remonter le moral :

-Ça prend combien d’auteurs pour changer une ampoule?

On s’en fout : Peu importe le nombre d’auteurs qui travailleront sur ce contrat, tout le crédit ira aux producteurs.

 

-À quoi sert un préservatif pour un auteur?

À freiner la compétition.

 

-Qu’est-ce que fait un auteur après avoir fait l’amour?

Il boude, parce qu’il est certain que ça a déjà été fait ailleurs par quelqu’un d’autre.

 

-Comment fait-on pour noyer un auteur?

On dessine un chèque dans le fond d’une piscine.

 

-Qu’est-ce qu’un auteur?

Un ancien acteur à qui on a défendu de fumer pendant les pratiques.

 

-Pourquoi les auteurs s’intéressent-ils au bonheur des autres?

Parce qu’ils savent que toute bonne chose a une fin.

 

-Comment appelle-t-on un auteur à la retraite?

Un cadavre.

 

-Qu’est-ce qui est écrit sur une pierre tombale d’auteur?

Son nom, sa date de naissance et sa date de décès. Le reste a été coupé à la révision.

 

-Pourquoi paie-t-on les acteurs, le réalisateur, l’éclairagiste, les musiciens et l’accessoiriste avant l’auteur?

Pour justifier le fait que son nom ne figure pas au générique.

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Quinzième leçon – Le Masterclass, deuxième partie

Quinze minutes de silence remplies de malaise plus tard, le pianiste reprit sa leçon. Ce furent les quinze minutes de silence les plus longues de ma vie, c’est pourquoi, pendant que les gens étaient occupés à être scandalisés par je-ne-sais-trop-quoi en me fixant de leurs gros yeux, j’en profitai pour rédiger ma liste d’épicerie pour la semaine : « Café, confiture, pain, biscuits de pianiste. » Oui, oui, des biscuits de pianiste. C’est un gars au Conservatoire qui m’a parlé de ce type de nourriture conçue spécialement pour nous. J’ai donc demandé à mon épicier de me commander ces fameux biscuits de pianiste. Celui-ci a sourcillé légèrement, mais quand il a vu que j’étais très sérieuse, il n’a pas rouspété un instant et m’a assuré que la semaine suivante, mes biscuits de pianiste allaient être sur les étagères de son Provigo. En effet, le lundi, lorsque j’allai faire mes emplettes, Ronald avait pris soin de rédiger en grosses lettres noires au crayon feutre sur un carton brun « BISCUITS DE PIANISTE » devant l’unique boite de carton qui se trouvait sur une table minuscule au fond du magasin. La boite ressemblait étrangement à un emballage de Whippet sur laquelle la mention BISCUITS DE PIANISTE avait été ajoutée. C’était très mignon et surtout très attentionné de sa part d’avoir fait cette commande personnalisée!

Cette histoire de biscuits fit naître une question en moi que je m’empressai de demander au maître :

-Monsieur LeLièvre?

-Si c’est encore pour nous lâcher une réplique vulgaire…

-Non, pas du tout.

-Dans ce cas, allez-y…

-Un de mes collègues au Conservatoire m’a parlé qu’il existait de la nourriture conçue exclusivement pour les pianistes…

-Pffff… mmm… euh, oui, oui…

-Eh bien, je me demandais quels étaient les autres privilèges auxquels nous, pianistes, avions droit??

(Silence)

-Euh… des privilèges… eh bien…

Je sentis le air musicien réfléchir un instant, léger sourire en coin.

-À la banque, on n’a jamais besoin de faire la file.

Un spectateur se leva et clama :

-Dans les toilettes publiques, on peut passer devant tout le monde et même sortir de force un occupant pour prendre sa cabine!

Guillaume poursuivit :

-Aux douanes, pas besoin de présenter son passeport.

Une femme au fond de l’auditoire cria :

-Pas besoin de respecter les limites de vitesse sur les autoroutes!

Deux jeunes étudiants se retournèrent vers moi :

-Tu peux fumer un énorme joint dans une garderie et personne ne va t’arrêter!

-Ouais! Et tu peux même décider, un matin, que tu t’habilles pas et le monde va te laisser te promener nue n’importe où!

Je pris tous ces bons conseils en note. C’est fou ce qu’on peut faire quand on est pianiste! Je plains les pauvres harpistes… surtout mon cousin Gunther, ce jeune harpiste roux et obèse qui passe ses week-ends déguisé en princesse dans des Grandeurs Natures.

En sortant du Masterclass, ce soir-là, je me sentais plus compétente que jamais. Ce que Guillaume LeLièvre nous avait livré comme secrets allaient m’être utile au cours de ma longue carrière de soliste, j’en étais persuadée.

J’empruntai la rue Papineau pour sortir de Montréal par le pont Jacques-Cartier, mais hélas, la circulation était paralysée et j’en avais pour une bonne heure à descendre la rue pare-choc à pare-choc. Comme j’en avais ras-le-bol de ma journée et que mon lit m’appelait, je fis ce que tout bon Alain Lefèvre ou Léopold Godowski aurait fait : Je suis sortie de la rue pour emprunter le trottoir avec ma voiture.

-EXCUSEZ-MOI!!!

Les piétons, affolés, se mirent à m’engueuler :

-Espèce de FOLLE!!!

Alors, pour les rassurer, je hurlai :

-NE VOUS INQUIÉTEZ-PAS; JE SUIS PIANISTE!!!

En moins de vingt minutes, j’étais rendue chez mon frère, à Drummondville. Dix-huit voitures de police m’y accueillirent.

Malheureusement, lorsque j’essayai d’expliquer au juge que j’étais réellement pianiste, il sembla perplexe face à ma défense et m’envoya passer des tests psychiatriques à l’Institut Pinel.

Premier test : En quelle année sommes-nous?

-Eh bien, vous êtes en même année que moi.

Deuxième test : Que voyez-vous sur ce carton?

-Un fond noir dans un encadré blanc découpé tout croche.

Troisième test : De quelle couleur est le cheval blanc de Napoléon?

-Il est Blanc de Napoléon. Celle-là, elle était facile!

Quatrième test : Entendez-vous des voix?

-Non, juste la vôtre…

-Très bien.

-… qui me dit « mets le feu à l’hôpital! »

Dernier test : Pourquoi pensez-vous que vous êtes pianiste?

-Parce que je suis plus intelligente que les autres et que j’ai l’air fraîche.

 

Heureusement, les infirmiers n’apposèrent pas l’étampe rouge « FOLLE » sur mon dossier, mais plutôt celle de « GROSSE ÉPAISSE », ce qui me rendit ma douce liberté.

 

 

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